Retraites : pénibilité et gestion des fins de carrière dans la Fonction Publique
Publié leRetraites : pénibilité et gestion des fins de carrière dans la Fonction Publique (14-01-20)
(Par CFDT-Fonctions publiques)
La CFDT Fonctions publiques a rencontré mardi 14 janvier le ministre Olivier Dussopt accompagné de son directeur de Cabinet, de Sophie Lebret du Cabinet de Laurent Pietrazewski et de représentants de la Dgafp dans le cadre des concertations prévues sur le projet de loi sur la réforme des retraites.
L’objet de la rencontre était centré sur le dossier de la pénibilité dans les fonctions publiques.
La CFDT redit ne pas vouloir confondre, ni traiter ensemble les dossiers pénibilité et aménagement de fin de carrière, ni pénibilité et usure professionnelle.
La CFDT s’est exprimée par une déclaration liminaire (voir annexe).
Elle a notamment alerté le ministre sur la méthode de travail sur le dossier et sur la prochaine réunion du CCFP le lundi 20 janvier qui doit examiner le texte de loi sans que l’on en connaisse très précisément le cadre juridique : examen complet ou examen centré sur les seuls articles concernant la fonction publique. Une incertitude juridique que le Conseil d’État doit lever d’ici la fin de la semaine.
Pour la CFDT la portée du texte et son ampleur ne nous permet pas de réaliser un travail approfondi d’amendements dans un délai aussi court.
Le ministre nous indique que l’absence d’amendements déposés n’aura pas de conséquences « politiques » étant donné que le texte pourra encore évoluer avant le conseil des ministres du 24 janvier, avant la présentation devant le Parlement début février et au cours du débat parlementaire proprement dit. Nos revendications pourront être prises en considération à chacune de ces étapes.
Sur la pénibilité
La CFDT a été écoutée avec attention par nos interlocuteurs, nous avons réitéré nos revendications :
- Ouverture possible pour tous les agents concernés, d’un compte pénibilité dans le Compte Personnel d’Activité. Tous les agents doivent être « couvrables ».
- Réintégration des 4 critères retirés en 2017 du C3P (postures pénibles, port de charges lourdes, vibrations et risques chimiques).
- Reconnaissance du caractère universel du dispositif qui devra concerner tous les agents exposés, sans référence à des corps, des statuts ou des cadres d’emplois ; ni à des catégories ou tailles d’employeurs.
- Nécessité de revoir les seuils d’exposition sur chacun des critères.
Nous avons soulevé d’autres questions importantes :
- La prise en compte des temps partiels ou temps non-complets pour l’entrée dans le champ du dispositif (adapter les seuils en conséquence)
- La question des poly-exposés à plusieurs critères de pénibilité et qui n’atteignent pas les seuils sur aucun des critères, mais subissent globalement de la pénibilité. Nous souhaitons la possibilité d’une validation de points sur le C2P selon des modalités qui seront précisées.
- La question des transitions entre les catégories actives et le C2P pour les générations post 1975. Nous revendiquons la prise en compte sous une forme à déterminer des droits acquis dans l’ancien système (nombre d’années d’exposition). La CFDT fera des propositions.
Le ministre et Sophie Lebret nous ont répondu :
- Qu’ils confirmaient l’approche universelle du dispositif quelle que soit la taille ou la nature des établissements.
- Qu’il n’y aurait pas de retour aux 4 critères retirés en 2017, à part sur les risques chimiques, sur la base du rapport Paul Frima et dans le cadre de concertations spécifiques à la FPH avec le cabinet d’Agnès Buzyn.
- Qu’ils étaient ouverts aux propositions de modifications des seuils et des planchers, travail de nuit par exemple.
- Qu’il y aurait une portabilité des droits (cumul des années d’exposition) pour les agents en uniformes qui changeraient de corps ou de cadres d’emplois (un surveillant pénitentiaire qui devient gardien de la paix), alors que ce n’est pas possible aujourd’hui.
- Que sur les poly-exposés, il y aurait un travail avec le ministère du travail pour étudier la question. Pour le moment il est juste envisagé de retirer le plafond du nombre de points cumulables pour les agents qui sont multi-exposé ET qui atteignent les seuils d’exposition.
- Qu’une proposition de fongibilité des points du C2P et du CPF est à l’étude pour améliorer les transitions professionnelles (pour celles et ceux qui le souhaiteraient).
- Que le futur C2P se déploiera d’autant plus facilement si les employeurs publics ne se soustraient pas à l’obligation de déclaration de la DSN (déclaration sociale nominative) en demandant des dérogations.
- Le ministre nous invite à faire remonter nos propositions sur chacun des sujets que nous avons pointés. Il indique aussi ne pas pouvoir prendre d’engagements étant donné que beaucoup de sujets se traiteront en inter ministériel.
- Le projet de loi suite au courrier du PM du 11 janvier sera modifié rapidement notamment avec le retrait de l’article 56 bis sur l’atteinte de l’équilibre financier avant 2027.
La CFDT a retenu :
- L’écoute attentive du ministre et de ses collaborateurs, la volonté de prendre en compte et de porter nos propositions même si le pouvoir de décision ne lui revient pas. La possibilité d’agir sur le texte de la loi jusqu’au moment du débat parlementaire, et sur le renvoi à des ordonnances ou des décrets.
- Le plan Santé au travail actuellement négocié en interprofessionnel côté secteur privé sera décliné dans les fonctions publiques pour davantage de transversalité et d’efficacité.
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Annexe : Déclaration CFDT – Bilatérale relative à la prise en compte de la pénibilité et à la gestion des fins de carrière dans la fonction publique – 14 janvier 2020
Monsieur le ministre,
Avant d’en arriver au sujet central de notre rencontre, nous souhaitons aborder plusieurs points avec vous :
- La question des rémunérations : nous partageons la nécessité d’apporter des réponses à la situation des enseignants, des enseignants-chercheurs et des chercheurs. Mais la CFDT, dont la représentativité repose sur l’ensemble des trois versants, appelle une nouvelle fois votre attention sur le fait que de nombreux agents seront pénalisés par la mise en œuvre du système universel, aucune solution n’est mise en œuvre pour compenser la faiblesse, parfois l’inexistence, de leurs régimes indemnitaires.
- La question de la transition : la CFDT (Confédération et Fonctions publiques) portera une position qui tient désormais compte de la perspective dite « d’affiliation successive ». Nous revendiquons donc très clairement que ce soit le dernier traitement de fin de carrière perçu par l’agent qui soit pris en compte dans le calcul de la pension « ancien régime ».
- Dernier « hors-sujet » : on ne peut écarter l’hypothèse de voir le CCFP reporté faute de quorum. De plus, le texte qui nous a été transmis est d’ores et déjà caduc. Dès lors, quelle méthode de travail efficace retient-on afin de pouvoir faire évoluer les textes de loi ?
J’en arrive maintenant à la pénibilité.
L’article 1er de l’exposé des motifs prévoit que le système universel doit prendre en compte les spécificités de certaines situations (carrières longues, métiers pénibles ou dangereux, situation de handicap, d’inaptitude ou d’incapacité). Il prévoit également que le système universel de retraite doit garantir un niveau de vie satisfaisant aux retraités, reflétant les revenus perçus pendant la vie active.
L’article 33 de ce même exposé des motifs indique que la prise en compte de la pénibilité sera l’un des piliers de l’universalité de notre système de retraite autour d’un principe très simple : que l’on exerce une fonction pénible dans le secteur privé ou dans un service public, ceci doit ouvrir à tous les mêmes droits.
L’extension du C2P à la fonction publique est une avancée certaine pour les agents et salariés concernés mais la non prise en compte de tous les facteurs en amoindri la portée. La pénibilité touche une proportion importante d’agents publics et pas uniquement les personnels hospitaliers. Les études les plus récentes pointent le fait que l’exposition aux facteurs de pénibilité est supérieure dans la fonction publique à ce qu’elle est dans le privé. Il n’est pas question d’ouvrir un concours à celui qui aura le travail le plus pénible mais bien de confirmer qu’il est nécessaire de réintroduire la prise en compte des quatre facteurs exclus du C3P devenu C2P dans des modalités à définir pour éviter les crispations qui ont conduit à les exclure et pour répondre véritablement aux articles 1er et 33 de l’exposé des motifs de ce projet de loi portant réforme des retraites.
Pour la CFDT, la prise en compte de la pénibilité n’est aujourd’hui pas à la hauteur : il est grand temps de mieux reconnaître la pénibilité pour toutes celles et ceux qui la subissent.
- Pour ces raisons, et toujours soucieux de l’intérêt des agents avant tout, nous sommes conscients que la prise ne compte des quatre facteurs ne signifie pas réintégration des quatre facteurs. Mais désormais, il nous appartient de trouver les voies et moyens :
- De reconnaître la pénibilité liée au travail et/ou aux conditions d’exercice et d’alimenter ainsi le compte pénibilité qui sera ouvert dans le compte personnel d’activité.
- De fixer la manière dont les points accumulés ouvriront droit à des départs anticipés.
- D’avancer sur la définition et la mesure des facteurs, particulièrement les facteurs posturaux (station debout, port de charge,…). Même si la question est la même pour l’exposition aux risques chimiques.
- De permettre la prise en compte de poly-expositions.
- De permettre que les agents à temps partiel et non-complets (très majoritairement des femmes) ne soient pas exclus du compte pénibilité.
- D’être clair sur l’approche retenue : quel équilibre entre le collectif et l’individuel, la CFDT souhaitant très clairement sortir de la seule approche statutaire. Mais vos propos dans Les Échos prouvent clairement que cette demande est entendue. Quelles solutions pour la concrétiser ? Pour la CFDT, la solution retenue ne devra pas laisser de côté des agents au prétexte du type ou de la taille des établissements ou des collectivités qui les emploient. Toutes et tous devront être couverts.
Enfin, dernier sujet à traiter : celui de la transition entre la catégorie active et le compte pénibilité. Pour la CFDT, les droits acquis pour les agents nés après 1975 doivent être retranscrits d’une manière ou d’une autre dans le nouveau système. Il ne serait pas acceptable que l’ensemble des annuités effectuées dans un corps ouvrant droit à la « catégorie active » soient perdues.
Pour finir, nous sommes demandeurs de précisions sur la méthode de travail : il est impensable pour la CFDT que notre concertation d’aujourd’hui reste sans suite.
Par CFDT-Fonctions publiques