Retraites : les premières propositions de la CFDT sur la pénibilité et l’emploi des seniors
Publié leLa concertation entre le Gouvernement et les partenaires sociaux s’est ouverte le 10 octobre. Les premiers échanges portent sur l’emploi des senior·es et la prévention de l’usure professionnelle, sujet sur lequel la CFDT est tout particulièrement engagée.
La prise en compte de la pénibilité : une CFDT déterminée
La CFDT réclame une meilleure reconnaissance et réparation de la pénibilité. Pour cela, elle revendique la réintégration des 4 facteurs exclus du C3P transformé en C2P (1) en 2017 (les postures pénibles, les manutentions manuelles de charges, les vibrations mécaniques, l’exposition aux agents chimiques dangereux). Ce sont ces 4 facteurs qui sont responsables de l’écrasante majorité des maladies professionnelles : 95 % des maladies professionnelles reconnues en 2019 ! Sans cela, il ne peut y avoir de justice sociale !
Pour ce faire, la CFDT propose que ces 4 facteurs soient réintégrés par voie d’accord de branche, ou à défaut, en s’appuyant sur les données statistiques en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle par métier de la branche ATMP (2). Cela permettra ainsi de mieux prendre en compte la polyexposition (c’est-à-dire le fait d’être exposé à plusieurs facteurs de risque) et ainsi d’acquérir plus rapidement des droits.
Cette revendication de la CFDT aboutirait à rendre éligibles au C2P les maçonnes et maçons, les carreleurs et carreleuses, les aides à domicile, les aides-soignantes et aides-soignants, les agentes et agents de caisses et certains personnels des supermarchés, de nouvelles catégories de salarié·es de l’industrie agroalimentaire, certaines ouvrières et ouvriers de la métallurgie, etc.
La reconnaissance de la pénibilité, grâce à l’obtention de points via le C2P, permet de partir en formation pour se reconvertir dans un métier moins pénible, de bénéficier d’un temps partiel sans perte de salaire ou de partir plus tôt à la retraite. La CFDT revendique son extension aux travailleurs et travailleuses des fonctions publiques, fonctionnaires (hors catégories actives) et contractuel·les. Nous proposons aussi au Gouvernement de déplafonner le C2P afin de faciliter l’utilisation des points de pénibilité acquis, pour favoriser la formation en vue d’une reconversion.
L’emploi des senior·es : un enjeu de société
En France, seul un·e senior·e sur trois (60-64 ans) est en activité au moment de partir en retraite, ce qui nous situe très en-dessous de la moyenne européenne. C’est vers un changement des mentalités que nous devons aller collectivement : un·e senior·e n’est pas un poids, mais une chance, un investissement ! Dès à présent, des mesures sont possibles pour favoriser cette évolution.
La CFDT défend ainsi l’instauration d’un dialogue social spécifique sur l’emploi et le travail des senior·es, dans les branches et les entreprises, avec obligation de négocier. Le constat est aujourd’hui sans appel : en ne reposant que sur la bonne volonté de quelques entreprises, ce sujet n’avance pas. Nous avons donc besoin d’un cadre contraignant. Ainsi, les entreprises concluant un accord bénéficieraient d’aides financières, les autres seraient, à terme, sanctionnées par une amende. Un tel dispositif permettrait alors d’éviter que seuls les salarié·es de grands groupes bénéficient de mesures spécifiques aux senior·es.
La CFDT revendique également la mise en place d’un « rendez-vous professionnel à 45 ans » systématique, appuyé par le Conseil en évolution professionnel. Cet entretien servirait à prévenir l’usure professionnelle, ou encore, à trouver une formation et pourrait conduire à réaliser un bilan de compétences financé.
La CFDT n’oublie pas non plus celles et ceux qui, à l’approche de la retraite, ne sont plus en emploi. Pour les demandeurs et demandeuses d’emploi de longue durée de plus de 50 ans, la CFDT revendique un accompagnement renforcé et personnalisé, sur le modèle de l’expérimentation menée avec les partenaires sociaux par le Conseil régional de Normandie, impliquant l’engagement des entreprises du territoire.
La fin de carrière : un temps à repenser
Ne plus être en activité du jour au lendemain est, pour beaucoup de travailleurs et travailleuses, un changement brutal. Pour la CFDT, plutôt qu’une rupture, le passage à la retraite peut être organisé pour devenir une transition progressive. Aménager son temps de travail en fin de carrière avec plus de liberté, c’est une question de bien-être, y compris au travail. Des dispositifs existent et nécessitent d’être renforcés. Par exemple : la retraite progressive, pour laquelle la CFDT revendique l’extension aux fonctions publiques, ou du temps partiel avec maintien en partie du niveau de rémunération pour les senior·es. Et si la CFDT a toujours été défavorable à une mesure d’âge uniforme, c’est qu’au-delà d’être injuste, elle ne laisse pas le choix du moment du départ à la retraite.
Enfin, la CFDT revendique la création d’un Compte épargne temps universel (Cetu), qui consisterait en un aménagement du temps de travail tout au long de la vie professionnelle, en fonction des temps de vie, et pourrait ainsi concerner la fin de carrière (pour aménager un temps partiel ou un départ en retraite anticipé par exemple).
Il est possible d’agir dès à présent sur l’emploi des senior·es et la reconnaissance de la pénibilité, la CFDT le démontre en faisant des propositions concrètes, partant de la réalité des travailleurs et travailleuses.
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1. Compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P) devenu le Compte professionnel de prévention (C2P) en 2017. Il contenait initialement 10 facteurs de risques, 4 ont été supprimés, 6 maintenus : travail de nuit, travail en équipes alternantes, travail répétitif, travail en milieu hyperbare, bruit, températures extrêmes.
2. Branche de l’assurance maladie couvrant les accidents du travail et les maladies professionnelles.
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