La forêt passe du ministère de l’Agriculture à celui de la Transition Ecologique
Publié leDeux articles récents viennent d’être consacrés au rattachement des forêts au ministère de la transition écologique : un article du Monde et un article d’Acteurs Publics, tous les deux du 8 janvier 2025. Vous trouverez ci-dessous une synthèse de ces deux textes.
Synthèse :
C’est un changement historique et surprenant, … pour la première fois depuis 1881, la forêt, historiquement gérée par le ministère de l’Agriculture, passe sous la tutelle du ministère de la Transition écologique dans le gouvernement de François Bayrou. La ministre Agnès Pannier-Runacher prend donc en charge ce portefeuille, mettant fin à une tradition de près d’un siècle et demi. Ce transfert symbolise une évolution majeure dans la manière dont la politique forestière est perçue et gérée en France.
Dans l’ensemble, cette réforme est bien accueillie par les ONG environnementales. L’association Canopée et d’autres organisations de protection de la nature voient cette transition comme un signal positif. La forêt est de plus en plus affectée par le changement climatique, notamment par une augmentation de la mortalité des arbres et une réduction de leur capacité à absorber le carbone. La nouvelle tutelle pourrait mieux intégrer ces enjeux environnementaux et promouvoir des politiques de préservation et d’adaptation.
En revanche, la filière bois reste silencieuse face à cette annonce, ce qui pourrait traduire un malaise ou une incompréhension. Certains acteurs, comme le Syndicat des énergies renouvelables, s’inquiètent d’une éventuelle restriction des usages du bois à des fins énergétiques, tandis que le Centre national de la propriété forestière (CNPF) redoute une complexification administrative.
Plusieurs experts, dont Arnaud Sergent, de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), déplorent l’absence de préparation et de concertation avant cette réforme. L’inquiétude porte sur la coordination entre les différents ministères et la capacité de la Transition écologique à imposer ses arbitrages. Certains craignent que ce changement ne résolve pas le problème de fond : l’intégration de l’adaptation au changement climatique dans l’ensemble des politiques publiques.
De fortes inquiétudes sont exprimées sur les ressources humaines et l’organisation administrative. En effet le transfert de la gestion de la forêt soulève également des préoccupations parmi les agents concernés. Beaucoup dénoncent un manque de communication et de clarté concernant les conséquences sur leurs statuts, rémunérations et conditions de travail. Certains craignent une dégradation de leur régime indemnitaire, traditionnellement plus avantageux au sein du ministère de l’Agriculture. Le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel des agents (RIFSEEP) ainsi que le CIA – l’une de ses composantes – sont en effet plus favorables au ministère de l’Agriculture. Certains redoutent aussi des difficultés accrues pour les mutations si les postes liés à la forêt passent entièrement sous la gestion de la Transition écologique.
Le ministère de l’Agriculture (MASA) tente de rassurer en affirmant que les modalités de gestion seront mises en place en lien étroit avec le ministère de la Transition écologique, afin d’assurer un fonctionnement fluide pour les agents et les structures concernées. De son côté, le ministère de la Transition écologique (MTE) précise que bien que les agents forestiers changent de ministère, le secrétariat général du ministère de l’Agriculture continuera de piloter les aspects liés aux rémunérations, aux primes et à la mutuelle. De plus, la tutelle de l’Office national des forêts (ONF) restera sous la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE), mais sera exercée pour le compte d’Agnès Pannier-Runacher. Cependant, des incertitudes demeurent, notamment sur le positionnement administratif des services forestiers dans la nouvelle organisation.
Si ce rattachement traduit une volonté de replacer la forêt au cœur des politiques environnementales, il pose plusieurs questions : la Transition écologique pourra-t-elle mieux gérer la forêt que l’Agriculture ? Comment concilier les enjeux écologiques et économiques ? Cette réforme s’inscrit-elle dans une vision à long terme ou risque-t-elle d’être remise en question en cas de changement politique ?
Ce débat reste ouvert et sa mise en œuvre effective sera déterminante pour juger de son impact réel sur la gestion forestière en France.
Les décrets d’attribution ministériels devraient ne pas tarder à être publiés. Ils définiront noir sur blanc dans les prochains jours les modalités de cette modification de périmètre et les compétences en matière de politiques publiques forestières.
La CFDT (UFETAM et Spagri) vont suivre avec vigilance l’évolution de ce dossier notamment sur le volet ressources humaines.
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Pour aller plus loin :
Lien vers l’article du Monde : Les forêts rattachées pour la première fois au ministère de la transition écologique, dans le gouvernement Bayrou –
Lien vers l’article d’Acteurs Publics : Le passage de la Forêt au ministère de la Transition écologique, une première – Par Philippine Ramognino
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