Guillaume Kasbarian, nouveau ministre de la Fonction Publique, veut « débureaucratiser » la France

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Dès sa première prise de parole en tant que nouveau ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian s’est fixé l’objectif de « débureaucratiser » la Fonction publique. Résultat : les syndicats se disent méfiants à l’égard de ce « macroniste » de la première heure.

Guillaume Kasbarian s’est surtout fait connaître fin 2022 en donnant son nom à la « loi anti-squat » dont il était le rapporteur. Alors simple député, il défendait ardemment la loi « visant à protéger les logements contre l’occupation illicite ». Plus d’un an après sa promulgation, cette loi a surtout pénalisé les plus vulnérables (notamment des locataires n’ayant que de petits retards ou quelques dizaines d’euros manquants) et mené à des centaines d’expulsions dénoncées par nombre d’associations œuvrant dans ce domaine.

Lors de sa prise de fonctions, le 23 septembre dernier, Guillaume Kasbarian, nouveau ministre de la Fonction publique, de la Simplification et de la Transformation de l’action publique, a mis en avant son ambition de « débureaucratiser à tous les étages ». Cette annonce a immédiatement éveillé des réserves chez les syndicats, soucieux de l’impact que cela pourrait avoir sur les agents et la qualité des services publics.

Simplification administrative

Guillaume Kasbarian, ancien ministre du Logement, donc rattaché au MTECT, a souligné l’importance de « libérer les Français du poids des démarches administratives » lors de la cérémonie de passation avec son prédécesseur Stanislas Guerini. Ce dernier ne disposait pas d’un portefeuille intégrant la simplification, ce qui marque une nouveauté dans l’approche de Kasbarian.

Le nouveau ministre a rappelé son attachement à l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui consacre le droit à la propriété privée, et a aussi mis en avant l’article 15, selon lequel « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Ce cadre juridique, bien que fondamental pour lui, a été accueilli avec scepticisme par certains représentants syndicaux.

Mise en garde contre une opposition stérile

Mylène Jacquot, la secrétaire générale de la CFDT Fonctions publiques, a vivement réagi à cette vision. « On ne peut pas opposer les usagers des services publics aux 5,7 millions d’agents publics, ça n’a jamais marché comme ça », a-t-elle déclaré, pointant les risques d’une approche qui créerait une fracture entre les agents et les citoyens. Elle a également souligné que toute réforme de simplification ne devrait pas porter atteinte à la qualité des services rendus aux usagers. « C’est un discours qui suscite des interrogations », a confié la secrétaire générale de la CFDT-Fonctions publiques, Mylène Jacquot. « On n’a pas de problème avec la simplification, mais il faut la construire correctement et, surtout, elle doit servir en premier lieu les agents. »

Amélioration des services publics

Malgré les inquiétudes, Kasbarian a insisté sur l’importance de la « simplification » qui, selon lui, doit « faciliter la vie des Français et des agents publics ». Il a exprimé sa confiance dans la réussite de ces réformes grâce au « remarquable travail » des agents publics, rappelant leur engagement quotidien. En tant que député de terrain, vivant dans un village rural près de Chartres, Kasbarian a affirmé être à l’écoute des citoyens et des agents, ceux qui se sentent souvent « enfermés dans un labyrinthe bureaucratique ». Cette « souffrance », partagée selon lui aussi bien par les usagers que par les agents, justifie l’intégration de la simplification et de la transformation dans son portefeuille ministériel.

Scepticisme grandissant chez les syndicats

Cependant, certains syndicats restent prudents et ont exprimé leur inquiétude dès la veille de la passation, redoutant que la simplification ne cache en réalité une réduction des effectifs et une dégradation des services publics. L’Unsa-FP a relevé un signal potentiellement positif dans l’ordre des termes du nouveau ministère : la « fonction publique » apparaissant avant « simplification et transformation de l’action publique ».

Réformes sous surveillance

Dans son discours, Kasbarian a salué les réformes ambitieuses entreprises par son prédécesseur, Stanislas Guerini, sans pour autant préciser ce qu’il adviendrait des projets initiés, notamment celui de la réforme de la fonction publique, gelée par la dissolution de l’Assemblée nationale. Ce texte controversé prévoyait des mesures telles que l’augmentation de la rémunération au mérite, la facilitation des licenciements, ou bien encore la remise en cause du système de catégories (A, B, C) des fonctionnaires, qui ont été largement critiquées par les syndicats. Le ministre est aussi attendu au tournant sur la question cruciale de la réforme des rémunérations et des carrières, initiée par Guerini. « La CFDT Fonctions publiques attend de rencontrer Guillaume Kasbarian pour lui rappeler les priorités des agents : le pouvoir d’achat et le renoncement au projet de loi » visant à réformer la fonction publique, écrit Mylène Jacquot sur X (Twitter).

Quant aux demandes syndicales pour une augmentation des salaires et une suspension de la réforme des retraites, exprimées à l’unisson par les huit syndicats représentatifs dans une lettre récente au Premier ministre, ces sujets n’ont pas été directement abordés par Kasbarian, bien qu’il ait reconnu les efforts de Guerini pour améliorer la rémunération des fonctionnaires.

Perspectives législatives et attentes syndicales

Les syndicats restent dans l’attente de la décision du gouvernement concernant l’avenir de ce projet de loi. Selon certaines sources, il pourrait être abandonné, bien que des mesures déjà actées, telles que celles relatives à la prévention de l’usure professionnelle et la prévoyance dans la fonction publique territoriale, nécessitent un support législatif. Si un nouveau projet de loi devait voir le jour, il pourrait être expurgé des aspects les plus polémiques, mais les représentants syndicaux restent vigilants face à la possible reprise d’initiatives contraires aux intérêts des agents publics. Les organisations syndicales ont en tout cas une revendication en commun : l’abandon de ce projet de loi de réforme de la fonction publique que portait Stanislas Guerini, un texte censé répondre aux problèmes d’attractivité de la fonction publique.

« Il faut remettre les choses dans l’ordre et commencer par abandonner ce projet », a souligné Mylène Jacquot. « On doit se mettre autour de la table et négocier, mais il faut remettre au cœur de nos échanges les conditions de travail, les moyens pour l’exercer, etc. »

Le ministre Kasbarian a émis le souhait de travailler « aux côtés de tous les fonctionnaires pour bâtir une fonction publique moderne ».

Les syndicats seront reçus au ministère de la Fonction publique, lundi 30 septembre et mardi 1er octobre.

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