Fiasco des élections professionnelles 2022 organisées par le ministère de l’Intérieur
Publié leLa présentation du rapport flash de l’Inspection générale de l’Administration est l’occasion pour la CFDT de faire un petit retour sur le fiasco des élections professionnelles 2022 pour en tirer quelques recommandations utiles à tous pour 2026 !
Le 8 décembre 2022 se sont déroulées les élections professionnelles dans la Fonction publique.
La loi de transformation de la fonction publique de 2019 a introduit la généralisation du vote électronique pour ces élections professionnelles.
Dans la Fonction publique de l’État, le ministère de l’Intérieur et de l’Outre-mer (MIOM) était donc responsable de la mise en œuvre ce mode de scrutin sur tout le périmètre du ministère (préfectures, gendarmerie, police, DDI …). Le MIOM, en charge des élections professionnelles, avait déjà organisé, en 2018, des élections professionnelles par vote électronique au sein de son ministère, qui globalement s’étaient bien déroulées, avec une participation améliorée par rapport au vote à l’urne de 2014.
Mais lors des élections 2022, le 30 novembre, veille de l’ouverture de la période du vote électronique, les organisations syndicales représentatives des DDI ont refusé de sceller les urnes au vu du très grand nombre de listes électorales non fiables, parfois massivement.
Dans la précipitation, les secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), services supports des DDI, ont été obligés, le 8 décembre, d’organiser des élections à l’urne, rendant impossible les votes par correspondance compte tenu des délais d’organisation.
À la suite de cette défaillance de l’administration, le MIOM a diligenté une mission d’inspection pour comprendre ce qui a amené à cette situation et faire des préconisations pour les élections professionnelles de 2026.
Le constat de la mission d’inspection
- Manque d’écoute : le MIOM n’a pas su prendre en compte l’expérience du secrétariat général du gouvernement (SGG) sur les élections 2018 et écouter les organisations syndicales qui ont régulièrement alerté sur les dysfonctionnements prévisibles.
Pendant des mois, la CFDT a demandé lors des groupes de travail d’anticiper un plan B au cas où… mais cette demande a été balayée d’un revers de main. L’existence des DDI, avant leur rattachement au MIOM, est toujours oublié.Preuve en est : le taux de participation aux élections 2018 n’est pas repris dans le rapport de l’inspection générale de l’administration (IGA). Pourtant il était de 81,10% comparable au meilleur taux de participation du MIOM.
- Manque d’anticipation et d’organisation : la cartographie des instances a été définie très tardivement et le choix du prestataire a seulement un an des élections.
La CFDT a bien trop souvent eu le sentiment que la spécificité des DDI n’était pas entendue par le MIOM. Elle ne remet pas en cause l’engagement des agents qui avaient en charge ce dossier difficile, mais plutôt le manque d’anticipation et de prise en compte de la complexité du processus. Le MIOM s’est contenté de mettre en avant son expérience en matière d’organisation des élections générales ainsi que du scrutin électronique de 2018 pour calmer ces alertes !
- Manque de confiance : le principal problème a résidé dans la non-fiabilité des listes électorales. Pourtant les SGCD avaient localement effectué ce travail, mais la DRH et le prestataire n’ont pas été en mesure de les prendre en compte.
- Manque de concertation avec les autres ministères de l’administration territoriale de l’État (ATE) : la suspension de la collecte des données nécessaires à l’établissement des codes d’accès aux plateformes de vote.
La CFDT a dénoncé les modalités de recueil des données individuelles engagées au printemps 2022. Il a fallu 3 mois pour que les ministères de l’ATE se mettent d’accord sur une liste commune. Les SGCD ont fait le maximum pour répondre aux commandes du MIOM et établir les listes électorales fiables, dans un contexte tendu au sein des nouveaux SGCD. Mais leur travail n’a pas été pris en compte !
- Manque de dialogue avec le prestataire de la solution de vote : Le MIOM avait fait le choix d’élargir les contraintes de protection des agents des forces de sécurité à tous les agents du périmètre du ministère. Cette contrainte extrêmement forte a participé à tendre les relations avec le prestataire.
La CFDT regrette que ce choix de pseudo-anonymisation des listes électorales, qui ne sont pas légalement imposées pour les agents des DDI, aient pu prendre une part importante dans le fiasco des élections professionnelles. Une concertation avec les représentants du personnel préalable à la constitution du cahier des charges aurait pu l’éviter.
À noter : le soir du refus de sceller les urnes des DDI par les organisations syndicales, le SG du MIOM a transmis un message à tous les SGCD et aux directeurs des DDI, qui ont été nombreux à le diffuser à leurs agents, faisant porter la responsabilité aux seules organisations syndicales du passage brutal au vote à l’urne. Or de nombreuses listes électorales électroniques divergeaient à plus de 20% des listes électorales fiables affichées dans les DDI.
La CFDT a dénoncé ce message mensonger sur la responsabilité des organisations syndicales dans ce « fiasco ».
Parmi les préconisations de la mission d’inspection :
- Anticiper: en associant les organisations syndicales au cahier des charges, et d’une manière générale dans tout le processus électoral, et notifier le marché 18 mois avant les élections. => rétroplanning
La CFDT élargit cette recommandation à toutes les autorités organisatrices. Pour les représentants du personnel, il est important de veiller à ce que le sujet des élections professionnelles 2026 soit porté dès fin 2024.
La CFDT veillera à ce que le dialogue social ne soit pas uniquement de façade, comme cela a pu l’être au MIOM, mais que les organisations syndicales soient écoutées, car ce sont souvent les seules à avoir vécues les élections précédentes.
- Harmoniser les modalités de vote : en maintenant la solution de vote du MIOM aux comités sociaux d’administration (CSA) de chaque DDI
La CFDT revendique qu’un agent dispose d’une seule série de codes permettant de voter à tous les scrutins auxquels il doit voter : le CSA de sa DDI, la commission administrative paritaire (CAP) de son corps d’origine, le CSA ministériel de son ministère d’origine, … afin de faciliter l’exercice du droit fondamental d’élection des représentants du personnel.
- Limiter les contraintes de protection d’identité aux forces de sécurité
La CFDT souhaite que les agents puissent voter en disposant de codes sécurisés sans être soumis aux règles strictes propres aux agents des forces de sécurité.
- Expertiser la faisabilité d’une solution de vote électronique propre à l’État
La CFDT souhaite que la solution de vote qui sera mise en œuvre en 2026 fonctionne, comme cela a été le cas en 2022 une fois que l’on arrivait à entrer dans l’application.
- Confier aux SGCD le soin de constituer les listes électorales et de les intégrer à la solution de vote
La CFDT souligne que les SGCD, malgré les très grandes difficultés dans lesquelles la plupart se trouvent, ont montré d’une part, leur connaissance des structures qu’ils gèrent en établissant des listes électorales fiables et d’autre part, en ayant majoritairement fait preuve de réactivité en organisant dans l’urgence des votes à l’urne.
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Pour aller plus loin :
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D’après un article initialement publié par L’UFFA-CFDT
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En lien avec un autre sujet connexe :
- Notre article du 05-09-23 : SGCD : Évaluation de l’organisation et du fonctionnement des secrétariats généraux communs de département (SGCD)
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